
Daniel Day (né le 8 août 1944), plus connu sous le nom de Dapper Dan, est un créateur de mode américain et couturier de Harlem à New York.
Sa célèbre boutique, « Dapper Dan’s Boutique », a opéré de 1982 à 1992. Très prisée des rappeurs, elle a introduit la haute couture dans le monde du hip-hop et vice-versa.
Grâce à sa clientèle faisant partie de la crème de la crème du hip-hop. Notamment « Eric B. & Rakim », « Salt-N-Pepa », « LL Cool J », et « Jay-Z ».
En 2017, il lance une ligne de mode avec Gucci. Il ouvre aussi en collaboration avec Gucci sa boutique « Dapper Dan’s of Harlem ».
En 2018, Dan est nommée une des 100 personnes les plus influentes de 2020 selon le magazine Time.
SON ENFANCE
À New York, la fashion week est l’endroit où toutes les nouvelles pièces des plus grands créateurs de mode sont exposées par de magnifiques mannequins.
Le jeune Dapper Dan, lui, ne fait pas partie de ce monde. Loin de là. Il vit à Harlem. Un quartier populaire de Manhattan.
Il a 3 frères et 3 sœurs et ses parents ont du mal à joindre les 2 bouts. Au point qu’il devait reboucher les trous de ses chaussures avec des petits bouts de carton pour aller à l’école. Ces chaussures lui faisaient tellement mal aux pieds qu’il s’effondra en larmes auprès de sa maman car il en pouvait plus.
C’est cette blessure qui lui donnera un sens aiguisé du style. À l’école primaire, Day a choisi le surnom de Dapper Dan parce qu’il venait à l’école avec des jeans froissés et des polos.
HUSTLER VIE
Devenu débrouillard, il deviendra un parieur très talentueux dès l’âge de 13 ans.
Il étudiera les probabilités pour devenir meilleur aux jeux de dés. Adolescent, il améliore sa garde-robe en dévalisant des magasins avec son gang qui s’appelle “Ali Baba et les 40 voleurs”.
Une nuit de jeu, alors que Day gagnait plus de 50 000 $ aux dés, il remarqua que l’ambiance dans la pièce avait complètement changé et sentait que tout le monde le regardait bizarrement. Il range ses gains dans sa poche, puis remet 500 dollars supplémentaires en jeu. Il fait mine de prendre une pause toilette et s’enfuit. Dan découvre plus tard que les gangsters du tripot avaient prévu de le dépouiller, le tuer et jeter son corps.
C’est alors qu’il arrête le jeu, et se tourne vers le recel de cartes de crédit volées.
Malheureusement, au collège, Dan commence à se droguer. Il faut savoir qu’à partir de la fin des années 50’s, Harlem est ravagé par une épidémie d’héroïne. Le trafic d’héroïne a augmenté à New York après la Seconde Guerre mondiale. Cultivé en Turquie et transformé par des fabricants de produits pharmaceutiques en Italie ou dans des laboratoires de chimie à Marseille, en France, le stupéfiant est introduit en contrebande à New York par la mafia américano-sicilienne. L’héroïne est devenue largement disponible dans la ville.
L’épidémie sera amplifiée plus tard par les militaires et vétérans de la guerre du Vietnam et Frank Lucas qui ramènera l’héroïne en masse aux États-Unis. Avec le retrait de la mafia du business de l’héroïne, beaucoup de jeunes déscolarisés veulent tenter leur chance et devenir riches.
Day commence à sniffer de l’héroïne, avant de quitter le collège pour vendre de la drogue avec ses amis. Mais rapidement, il voit le piège. Son entourage se retrouve soit assassiné, soit emprisonné. Il finira même par aller en prison 90 jours.
NOUVEAU DEPART
Plus tard, inspiré par Malcolm X, il décide de retourner à l’école et s’inscrit à un programme d’éducation parrainé par l’Université Columbia : l’Urban League.
Ce programme emmène de jeunes délinquants faire le tour de l’Afrique pour les remettre sur le droit chemin. En 1968, il part donc faire un tour en Afrique.
Il assiste en 1974 au combat de boxe légendaire entre Muhammad Ali et George Foreman à Kinshasa, « The Rumble in the jungle ».
Dan se fait fabriquer des costumes dans des tissus africains par un tailleur au Liberia. Ces apprentissages ont contribué à façonner sa vision de la mode ainsi que sa compréhension du monde.
Quand il revient à New York en 1974, Dan est un homme changé. Il avait renoncé à l’alcool, au tabac, à la drogue et était également devenu végétarien. La seule chose dans son esprit était d’être un couturier.
DAPPER’S DAN BOUTIQUE
Il essaya d’abord de créer des vêtements par lui-même mais les grossistes en textile qu’il allait voir lui refusent de lui vendre des fourrures ou autres textiles, parce qu’il est noir et qu’il vient d’une partie de New York qui ne les enchante pas.
Le seul grossiste qui accepte de travailler avec lui est Fred Schwartz, alias « Fred le Fourreur». Il lui fournit des vestes en fourrure. Qu’il n’aura pas de mal à vendre avant que la mode ne passe à Harlem. Il ouvre 24h/24h et est la seule boutique qui vend de la fourrure à Harlem.

Parmi ses clients, les plus gros gangsters comme Nicky Barnes alias « Mr Intouchable ». Il commence à vendre des vêtements de son coffre de voiture. Et la plupart des vêtements qu’il vendra seront des vêtements volés dans des magasins de New York.
Cependant, Dan est acharné. Il apprend de lui-même des compétences industrielles telles que l’impression textile et a même inventé une nouvelle façon pour les fabricants de vêtements d’imprimer sur du cuir.
Il engage plusieurs couturiers, tous Sénégalais, tous Wolofs.
L’arrivée du crack dans les années 80 rendra riche beaucoup de criminels. Et ces criminels se démarquent et montrent leurs richesses en s’achetant des vêtements chers et exclusifs. Il dira plus tard qu’il fut la dernière génération à voir Harlem sans épidémie de drogue et culture de la drogue.
Un jour, un client, un gros dealer de drogue arrive dans sa boutique avec une pochette Louis Vuitton et tout le monde dans le magasin s’excite. C’est au cours de cette période qu’il a pris conscience de la puissance des logos.
Depuis lors, il écoute sa clientèle et observe la mode de Harlem dans la rue. Ce qui lui permet d’adapter ses créations aux attentes de la population.
Le principal argument de vente de Dan était son utilisation illégale de logos de marques établies telles que Fendi, Gucci et Louis Vuitton et MCM pour créer ses propres créations personnalisées, son entreprise a explosé.
A partir du milieu des années 80, sa clientèle s’élargit aux rappeurs qui copient le style des gangsters. La culture Hip Hop récemment née a commencé à exploser et les rappeurs commençaient à gagner de l’argent.

Il vendra des pièces personnalisées à KRS-One, Fat Boys, Bobby Brown, Jam Master Jay, LL Cool J, Eric B. & Rakim, ou le groupe Salt-N-Peppa. Aussi, des stars du sport se fournissent chez Dapper Dan, telles que les boxeurs Mike Tyson et Floyd Mayweather, ou l’athlète Diane Dixon.

Ainsi, parmi les jeunes afro-américains des zones défavorisées, Dan est devenu populaire. Les gens aiment la qualité de ses créations même sachant qu’elles soient des contrefaçons.

Le couturier ne cache pas que l’épidémie de crack, dont la durée coïncide avec celle de sa boutique (1982-1992), a contribué à sa prospérité.
Dapper Dan n’est néanmoins pas épargné par la violence qui ravage le quartier. A la fin des années 1980, il est victime d’une tentative d’enlèvement. Il résiste et y échappe mais reçoit une balle, toujours logée dans sa nuque.
La bagarre de Mike Tyson, le combat contre les maisons de luxe

Le 23 août 1988, le médiatique boxeur Mitch Green appelle la presse pour montrer son cocard.
En effet, il vient de recevoir un coup de poing de la part de Mike Tyson, un autre jeune boxeur de New York devant la boutique de Dapper Dan.
L’affaire fait grand bruit et les médias commencent à se demander qu’est-ce que ce magasin qui amène deux célébrités faire des emplettes à 4h du matin.
Le New York Times écrit un papier sur la fameuse boutique de Dan.
Ce qui attire l’attention des avocats de Fendi. Ils envoient donc des huissiers et un raid est organisé sur sa boutique.
Plusieurs de ses créations contrefaites se feront saisir. D’autres raids suivront. Ce qui coutera beaucoup à Dan. Il finit par y laisser une fortune, un quart de millions de dollars.
En 1992, après une action en justice de Fendi puis du gouvernement, son magasin ferme définitivement ses portes.
Retour à l’underground pour 20 ans
Depuis, il évite le monde de la mode grand public. Il se remet à travailler en souterrain.
Désormais, c’est lui qui va chercher les clients. Il effectue des allers-retours à Chicago et à Atlanta. Il reste toujours en liens étroits avec le monde du hip-hop. On aperçoit de temps à autre ses créations aux Grammy Awards. Il a même commencé à équiper le boxeur invaincu Floyd Mayweather en 1999.
Appropriation de culture et bad buzz sur les réseaux sociaux
En mai 2017 à Florence, Alessandro Michele, le directeur artistique de Gucci, fait défiler un mannequin avec un blouson en vison à grosses manches rempli du logo Gucci.
La sprinteuse Diane Dixon reconnaît la pièce.

Elle ressemble à quelques différences au blouson que Dapper Dan lui avait confectionné en 1989. En colère, elle dénonce cette appropriation sur les réseaux sociaux.
Collaboration avec Gucci
Fendi répondra au backclash en invitant Dapper Dan a réaliser une collection homme. Ce que Dan acceptera.
Puis l’année suivante, en 2018, Day ouvre un nouvel atelier sur Lenox Avenue en partenariat avec Gucci. « Dapper Dan of Harlem », le premier magasin de mode de luxe à Harlem.
La maison d’édition Random House publie ses mémoires en Juillet 2019. Aussi, Sony ont acquis les droits d’adaptation au cinéma pour faire un film sur sa vie.

Dapper Dan fait partie des légendes dans la communauté hip hop. Son ingéniosité et sa ténacité lui ont permis de se hisser au top de la mode et du hip hop.